Evoqué par de nombreux écrits, ce haut-lieu de la geste arthurienne, est passé du statut de fiction littéraire à celui de réalité géographique grâce à sa localisation, au 19e siècle, à Paimpont, le plus grand massif forestier de Bretagne.
La première trace historique de la forêt de Brocéliande date du XII siècle, lorsqu’un poète normand du nom de Wace entreprend vers 1160 la rédaction de son Roman de Rou, chronique politique et versifiée de la conquête normande, commandée par Henri II. Pour ses travaux, Wace se rend en forêt de « Brecheliant » où se trouve une fontaine magique ayant le pouvoir de faire tomber la pluie.
« C’était en Brocéliande »(*)
Il faudra attendre Chrétien de Troyes et son récit chevaleresque, écrit vers 1176, pour que Brocéliande soit associée à la Légende du roi Arthur. Dans Le Chevalier au Lion, Yvain, qui siège à la Table Ronde, part à la recherche d’une fontaine merveilleuse capable de provoquer des tempêtes. Il se fraye ainsi un chemin à travers « une épaisse forêt » où il est contraint de chevaucher une journée entière. Devenue un motif littéraire, Brocéliande inspirera par la suite artistes et poètes, acquérant une renommée jamais démentie.
Au pays des fées
Au 19 ème siècle, érudits et savants cherchent à déceler derrière les légendes arthuriennes, des moments ou des personnages historiques. Il en est ainsi de Merlin (on croit alors qu’il a véritablement existé), le célèbre enchanteur qui aurait élu domicile à Brocéliande. Des travaux de cette époque finissent par situer le bois magique en forêt de Paimpont, au sud-ouest de Rennes. Le célèbre mage y aurait sa sépulture. C’est également dans cette forêt que se trouverait le Val sans retour où la fée Morgane aurait gardé captifs des centaines d’amants infidèles avant que ses enchantements soient rompus par Lancelot. Autre fée habitant ces bois mythiques, Viviane, compagne de Merlin y serait elle aussi enterrée dans une sépulture qui remonterait à la période du Néolithique et qui se visite toujours.
Quant à la fontaine magique dont parlaient Wace et Chrétien de Troyes, on trouve en forêt de Paimpont une source étonnante qui malgré une eau toujours fraîche, entre parfois en ébullition (sous l’effet du gaz carbonique, diront les sceptiques). Une impression renforcée par les pierres rougeâtres jonchant le sol et qui donne l’illusion d’un brasier.
Un mythe bien vivant …
Depuis le début des années 1990, la forêt de Paimpont connaît un véritable engouement touristique, attirant curieux et amateurs de magie, fascinés par l’aura légendaire des lieux. Elle abrite aujourd’hui le Centre de l’imaginaire arthurien, qui organise expositions, spectacles et randonnées. On peut même visiter la forêt de Brocéliande derrière un guide-conteur en costume d’époque muni de sa harpe celtique.
Un remarquable patrimoine naturel
Situés à environ 45 kilomètres de Rennes, Paimpont et ses 9000 hectares font partie du domaine forestier breton qui s’étend, lui, sur 380 000 hectares. Si la Bretagne est une région moins forestière que la moyenne hexagonale (15 % contre une moyenne nationale de 30 % sur l’ensemble du territoire national), elle se démarque par sa grande variété d’essences, reflet de la diversité des sols et des climats. Elle se compose en grande majorité de feuillus (68 %) et de résineux (32 %). Le chêne pédonculé est l’essence dominante, même si l’on retrouve également une part importante de châtaigniers et de hêtres. Parmi, les résineux, les pins sylvestres et maritimes sont très présents, ainsi que l’épicéa de Sitka, qui a été récemment la proie d’une invasion de dendoctrones, une espèce de scolytes.
Outre, cette variété d’espèces végétales, le territoire breton regorge d’une faune à la richesse remarquable. La présence de nombreux bocages, étangs et autres zones humides représente un havre pour une multitude d’espèces. Parmi eux le lézard vivipare, le triton crêté, la loutre d’Europe, l’escargot de Quimper, principalement en forêt d’Huelgoat, dans le Finistère. On y dénombre également un grand nombre d’oiseaux : passereaux, fauvettes et mésanges ainsi que des espèces de rapaces à l’instar de la buse ou de l’épervier. Autant de caractéristiques qui ont valu à la forêt bretonne d’être classée ZNIEFF (Zone d’Intérêt Écologique Faunistique et Floristique).
Quelques chiffres sur la forêt de Paimpont :
* 14 % du territoire régional.
* 68%de feuillus / 32 %de résineux.
* Près de 300 espèces répertoriées.
* 60 % des forêts publiques sont reconnues pour leur fonction écologique avec pas moins de162 hectares classés en réserve biologique et 20 000 considérées comme réservoir de biodiversité.
* 10 % des émissions de gaz à effet de serre régional sont séquestrées par la forêt bretonne
(*) Je trouvai un chemin à ma droiteau milieu d’une forêt épaisse.(…) Je suivis ce chemin et ce sentier. Pendant presque toute la journée, je chevauchais de la sorte ;puis je finis par sortir de la forêt : c’était en Brocéliande.
Adrienne Rey
Crédit photo : Michel Provost
Liens :
Informations historiques : broceliande.guide/La-foret-de-Broceliande
Mention de Brocéliande chez Chrétien de Troyes : https://broceliande.brecilien.org/La-Fontaine-de-Barenton-dans-le-Chevalier-au-Lion
Sites légendaires en forêt de Paimpont : tourisme-broceliande.bzh/lieu_categorie/sites-legendaires
Le boisement des régions françaises : inventaire-forestier.ign.fr/
Informations et chiffres sur les forêts bretonnes : https://www.onf.fr/onf/+/70::onf-en-bretagne.html#:~:text=La%20r%C3%A9gion%20bretonne%20concentre%20dans,et%20l’%C3%A9pic%C3%A9a%20de%20Sitka