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Les forêts, des puits de carbone au secours de la planète

Encouragée par le GIEC ou la COP 21, la (re)plantation est aujourd’hui considérée comme l’une des meilleures façons de lutter contre le réchauffement climatique. Une solution miracle ? Pas si vite ! Il ne suffit pas de planter des arbres par-ci par-là pour résoudre le problème, quelques règles sont à prendre en compte…

« Dans la lutte contre le réchauffement climatique, les arbres sont notre arme la plus puissante ». L’écologue Thomas Crowther en est persuadé, la création de forêts variées pourrait nous aider à réduire considérablement les émissions de CO2. Mais comment cela fonctionne-t-il ? Quels sont les mécanismes à l’œuvre pour obtenir cette réduction ?

Si les forêts sont considérées comme l’un des meilleurs moyens de lutter contre le réchauffement climatique, c’est qu’à l’instar des océans, elles constituent ce que l’on appelle des «puits de carbone», de véritables réservoirs naturels qui captent le carbone atmosphérique.

C’est possible grâce à un processus bien connu de tous et qui devrait rappeler quelques cours de Sciences-Nat’ à certains : la photosynthèse. Une réaction chimique qui permet aux végétaux de synthétiser des glucides grâce à l’énergie lumineuse du soleil. Au cours du processus, le CO2 est emmagasiné par les feuilles qui rejettent en même temps de l’oxygène.

Laisser faire la nature 

Une fois capté, ce carbone va devenir la matière constitutive des troncs, des branches, et du feuillage, mais également des racines.

Comment s’assurer une bonne captation et la pérennité de ce stock de carbone ? Il ne suffit pas de planter des arbres. Si l’on veut qu’une forêt devienne un véritable puits de carbone, des choix s’imposent. En premier lieu : limiter les interventions humaines (élagages, coupes…) et laisser la nature suivre son cours… Les forêts exploitées industriellement ont en effet un pouvoir de stockage de CO2 bien inférieur à celui des forêts primaires. Les chercheurs Jared Nunery et William Keeton ont constaté que les forêts nord-américaines non gérées par l’homme captaient de 39 à 118 % plus de carbone que celles qui l’étaient.

Lorsque la main de l’homme n’interfère que marginalement, les arbres peuvent se développer davantage (vivant alors plus longtemps, plus grand sera le diamètre de leurs troncs et meilleure la captation). Des cycles sylvicoles longs favorisent la cohabitation d’arbres jeunes et d’arbres âgés. Arrivés à l’état de sénescence, ces derniers fournissent du bois mort qui devient autant de réservoirs de carbone, la décomposition du réseau racinaire stocke à son tour ce carbone dans le sol et en améliore ainsi la fertilité. Un phénomène identique se produit lorsque les feuilles mortes, riches en nutriments, se décomposent et viennent nourrir l’humus.

Un sol plus fertile permettra également au feuillage et aux branches de l’arbre de mieux emmagasiner le carbone. Un coup d’œil sur la carte de France des réserves forestières de carbone suffit pour s’en convaincre. Ce sont dans les forêts anciennes, peu exploitées, au cycle sylvicole long (principalement dans le nord-est de la France) que l’on retrouve les réserves les plus importantes.

Favoriser la variété des espèces

En 2016, une étude publiée dans la revue Science, à laquelle participait l’écologue Thomas Crowther, met en évidence les résultats d’un vaste travail de recherche. En dressant la cartographie de plus de 30 millions d’arbres répartis dans 44 pays à travers le monde, les chercheurs sont arrivés à la conclusion que les forêts aux essences variées captaient plus de carbone que les monocultures.

Aujourd’hui, 80 % des plantations d’arbres dans l’hexagone sont des forêts de résineux. Or, si ces derniers emmagasinent rapidement le carbone durant les premières années de peuplement, sur le long terme, les essences de feuillus se révèlent les plus efficaces. Une grande variété d’espèces est également le gage d’une forêt plus robuste. On a ainsi pu récemment constater, lors d’épidémies de scolytes, un désastreux « effet domino » dans les monocultures d’épicéas…

Il ne s’agit pas pour autant de supprimer les plantations mono-espèces, nécessaires à la filière industrielle (bois d’œuvre, papier) et dont les retombées économiques sont importantes. Cependant les forêts aux essences diverses et variées, havres de biodiversité, ont un rôle bénéfique sur l’environnement et captent une plus grande quantité de carbone.

Outre la nature des espèces, la structure de la forêt joue également un rôle dans la captation de du CO2. Dans une plantation composée de multiples strates (futaies, taillis…), le carbone est mieux retenu au sein de l’écosystème forestier puis qu’environ 25 % du CO2 dégagé par le sol y est récupéré par le sous-bois (5 %) ou la canopée (20 %). Un autre moyen d’aider les arbres à emmagasiner un important volume de carbone consiste à limiter voire à supprimer les coupes rases qui entraînent un réchauffement de l’humus. Celui-ci favorise alors la prolifération de champignons décomposeurs qui multiplieront le relargage de CO2dans l’air par deux ou trois. Notons que suite à une coupe rase, 50 à 75 ans sont nécessaires pour que le stock de carbone retrouve son niveau initial.

Dans le cadre de son actuel Plan Climat, la France entend devenir un pays neutre en carbone à l’horizon 2050. Un objectif ambitieux pour lequel les forêts de l’Hexagone qui absorbent annuellement 14 % des émissions de gaz à effet de serre, joueront, à n’en pas douter, un rôle de premier plan, à condition de les développer massivement tant en surface que de les enrichir en diversité.

Adrienne Rey

Crédit photos : Jean Louis Laval

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